Aujourd’hui, les objets du journaliste de Cité24, Fayçal Cheffou, peuvent être récupérés par ce dernier. C’est en effet ce qu’un courrier postal officiel de la zone de police de Mons-Quivy a fait savoir à l’intéressé. Pour comprendre la raison pour laquelle Fayçal Cheffou avait eu à subir un tel traitement policier et judiciaire (arrestation, perquisition chez Cité24) il faut remonter un an et demi en arrière.
Au départ, Fayçal Cheffou, journaliste de Cité24, couvrait le procès Victor-Manuel Jacinto Gonçalves. Il s’agit du policier ayant tiré sur la petite Mawda d’une balle dans la tête, alors qu’elle était à bord d’une camionnette. Le procès avait lieu au tribunal de la ville de Mons. Il s’était alors fait interpeller par le procureur lui disant « qu’il n’avait pas le droit de filmer » et l’avait fait sortir de la salle « parce qu’il n’avait pas de carte de presse officielle ».
Ledit procureur avait, en plus, lancé un avis de recherche contre le journaliste. Le journaliste s’était pour cela fait arrêter à Saint-Josse, quand il filmait un banal contrôle de police dans le cadre de son travail. Une semaine plus tard, le 22 mars 2021, la police lancait une perquisition chez Cité24 et son matériel de reportage et informatique (ordinateurs, smartphones, etc.) saisi. Ce n’est que le mercredi 31 août 2022 qu’il a reçu un courrier afin qu’il puisse effectivement les reprendre.
Un traitement policier et judiciaire disproportionné ?
Aujourd’hui, les objets du journaliste de Cité24, Fayçal Cheffou, peuvent être récupérés par ce dernier. C’est en effet ce qu’un courrier postal officiel de la zone de police de Mons-Quivy a fait savoir à l’intéressé. Pour comprendre la raison pour laquelle Fayçal Cheffou avait eu à subir un tel traitement policier et judiciaire, il faut remonter un an et demi en arrière.
Les faits qui sont reprochés à Fayçal Cheffou se sont déroulés dans l’enceinte du tribunal de Mons. Là où avait lieu le procès de Victor-Manuel Jacinto Gonçalves, policier qui avait tiré sur la petite Mawda, lui ôtant ainsi la vie et qui avait été protégé par les institutions en charge de l’enquête, comme l’a révélé le journaliste Michel Bouffioux. Ainsi, saisi d’un réflexe journalistique, Fayçal Cheffou avait saisi son appareil et pris une photo dudit policier.
Victor-Manuel Jacinto l’avait remarqué et en avait fait part à son avocat, Maître Kennes, qui lui-même en avait averti le procureur. Aussitot, le procureur avait ainsi interpellé Fayçal Cheffou à ce sujet et demandé sa carte de presse. Fayçal Cheffou lui avait montré une carte de visite ou était indiqué sa fonction, mais qui n’était pas une « carte officielle reconnu par État », avait déclaré le procureur. Le journaliste de Cité24 s’était donc fait sortir de force de la salle d’audience.
Signalé « recherché » par le procureur pour avoir pris une photo de Gonçalves
L’affaire aurait pu en rester là, sans autre conséquence. Mais c’était sans compter le lancement d’une procédure, initiée par le procureur. En effet, ce dernier avait signalé le journaliste Fayçal Cheffou comme « personne recherchée » à toutes les zones de police du pays.
Il l’a appris à ses dépens lorsqu’il se trouvait dans la commune de Saint-Josse-ten-Noode à Bruxelles, à hauteur de la rue Verbist. Il avait sorti son smartphone et filmait un contrôle de police qui avait lieu, dans une démarche journaliste d’information.
Il lui avait été demandé de couper sa vidéo, alors qu’il se trouvait de l’autre côté de la rue et ne gênait en rien le travail des policiers. Puis, un contrôle d’identité s’en était suivi, auquel il s’était plié.
Après cela, les policiers lui avaient fait savoir qu’il allait être fouillé « pour voir s’il n’avait pas d’arme sur lui ». Il avait été arrêté, mené au poste de police. C’est là qu’il avait compris que l’origine de cette arrestation était initiée par le procureur de Tournai.
La motif de cet avis de recherche lancé par le procureur avait été « Usurpation de fonction ». Ce n’est que bien plus tard que les faits avaient été requalifiés en « Faux et usage de faux », explique Fayçal Cheffou.
Le monde de la presse « a fait silence »
Le journaliste Fayçal Cheffou a par ailleurs émis une critique quant à la réaction du monde de la presse dans cette affaire. Il s’est étonné du manque de soutien criant, selon lui, de la part des journalistes. « Je n’ai reçu aucun message de soutien, en public ou en privé, de la part de quelque organe de presse ni de quelque journaliste que ce soit. Or ce sont des "confrères" ». C’est ce qu’il a exprimé, non sans désarroi.
« Je n’ai pas non plus reçu de soutien de la part d’association de défense de la liberté de la presse, comme Reporters sans frontière, par exemple », ajoute Fayçal Cheffou. « Les seuls qui m’ont apporté leur soutien et leur solidarité sont des personnes ou des associations qui militent pour les droits humains ». Pour ce dernier, cela soulève une question de fond, et qui va au-delà de son cas personnel, au sujet de la liberté de la presse en Belgique.
Perquisition chez Cité24 et restitution des objets saisis un an et demi plus tard
Néanmoins, cela ne s’est, là encore, pas arrêté là. Le 22 mars 2021, le journaliste voyait le studio de Cité24 perquisitionné. Il ne disposait alors plus rien pour travailler. Pour Fayçal Cheffou, il s’était agi là d’une intimidation. En effet, tout cela lui permettait de réaliser correctement et professionnellement les reportages vidéo pour Cité24.
Cela avait porté un coup dur au média, mais il avait tenu bon. Ainsi, avec cette restitution qui n’est plus qu’à concrétiser, le média indépendant va pouvoir entreprendre une meilleure captation et retransmission des reportages réalisés.
Il a donc pu récupérer la longue liste de ses objets saisis. Parmi ceux-ci, il y avait tout de même plusieurs ordinateurs, des téléphones portables, ou encore des appareils photos avec les accessoires et des cartes mémoires.
Tout cela avait été gardé « pour le suivi de l’enquête », selon la police.
De plus, outre le courrier de la zone de police de Mons, l’intéressé a reçu un courrier du juge d'instruction de Tournai, en charge de l'affaire. Celui-ci lui a fait savoir la date et l’endroit où il pourra consulter son dossier judiciaire.
Le journaliste Fayçal Cheffou, par l’entremise de son avocat maître Olivier Martins, aura donc accès aux éléments qui l’ont incriminé, et notamment ceux qui ont mené à la perquisition chez Cité24 .