Début mai, le Tribunal du travail de Bruxelles avait condamné la STIB pour discrimination fondée sur les convictions religieuses et sur le genre. Depuis, c'était le blocage politique. Mais la Société bruxelloise de transports publics a annoncé ce lundi soir qu'elle ne fera pas appel...

Condamnée, le 3 mai dernier, pour discrimination à l'embauche, la Société des Transports Intercommunaux de Bruxelles (STIB) vient de faire savoir qu'elle renonçait à interjeter appel de sa condamnation. Jusqu'à ce lundi, aucun accord n'était intervenu entre les partenaires de la majorité gouvernementale - représentés au CA de la STIB - pour savoir si l'instance publique devait aller ou non en appel ? PS, One.brussels-Vooruit et Ecolo sont résolument contre tandis que Défi et l'Open VLD le souhaitent. Or, en fin de soirée, le comité de gestion de la STIB a annoncé que la STIB ne fera pas appel du jugement qui lui ordonne d'autoriser le port du foulard islamique à ses employées. Une décision pas encore définitive. En effet, le commissaire VLD du gouvernement l'a suspendue et a renvoyé le dossier vers le gouvernement bruxellois. Celui-ci a désormais 20 jours pour trancher.  

Règlement de travail sexiste et discriminatoire

Pour rappel, début mai, le Tribunal du travail a estimé que “la politique de l’emploi de la STIB est visiblement genrée”. Cela, après l'introduction d'une "action en cessation de discrimination" par l'UNIA, la ligue des droits humains (LDH) et la plaignante contre la STIB. A l'origine, la plaignante, juriste de formation, avait successivement postulé, en décembre 2015 et janvier 2016, pour le poste de Legal Officer et Business Analyst. Deux fonctions qui ne sont pas en contact avec le public. Elle a pu passer un entretien d'embauche. A la suite duquel "la personne n'a pas été retenue parce qu'elle ne disposait pas des compétences recherchées", a déclaré Françoise Ledune, porte-parole de la STIB. Cependant, la postulante en a conclu que le motif du refus était directement lié à son port du voile.

En première instance, les magistrats ont jugé que la plaignante avait été victime d’une double discrimination, sur la base du genre et de sa religion. Le tribunal estime que le règlement de la STIB, qui consiste à refuser tout signe religieux, pèse, de manière disproportionnée sur les femmes. S’agissant du plus gros employeur de la Région bruxelloise, le tribunal pointe comme criant le problème de parité à la STIB. En effet, en 2015, les femmes ne constituaient que 9 % du personnel - un chiffre qui monte à 22 % en ne considérant que les fonctions employées - et chute à 7,8 % dans les fonctions de conduite des véhicules.

Par ailleurs, le tribunal avait souligné que la STIB emploie de nombreux hommes de confession musulmane autorisés à porter la barbe. La discrimination indirecte basée sur le genre devient alors apparente. La STIB n’a pas pu la justifier de manière objective et raisonnable.

"Un signal important"

Pour la Ligue des Droits Humains (LDH), cette condamnation de la STIB constitue « un signal important pour les femmes qui souhaitent travailler en Région bruxelloise tout en portant le foulard et ouvre potentiellement la voie à une reconnaissance juridique des discriminations intersectionnelles ».

Ce n’est pas la première fois qu’une instance publique bruxelloise est condamnée pour discrimination. En 2015, Actiris avait été condamné pour les mêmes raisons. Depuis plus de 3 semaines, la STIB avait la possibilité de faire appel de ce jugement. La Société de transports publics vient d'y renoncer, ce lundi soir.

Pour autant, depuis plusieurs décennies, le compromis politique reste très difficile à trouver concernant cette fameuse "neutralité" dans la fonction publique. Inclusive ou exclusive, cette neutralité : il est plus qu'urgent que l'actuel gouvernement tranche définitivement. En s'inspirant de cette décision judiciaire récente qui s'inscrit clairement dans la longue lutte contre le sexisme et la discrimination en Région bruxelloise.