L'affaire Mathis a suscité un vif débat au Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB), mettant la ministre de l’Éducation, Caroline Désir (PS), sous les feux des questions des parlementaires d'Ecolo, du PS, de Défi et du PTB lors de la commission Éducation. Au sein du PS, la ligne semble claire : protéger l'école et la police tout en déplaçant la responsabilité vers le gouvernement fédéral.
La ministre de l’Enseignement, Caroline Désir a été soumise à un feu nourri de questions de la part de parlementaires (Ecolo, PS, Défi et PTB) en commission Éducation du Parlement de la fédération Wallonie-Bruxelles hier, mardi 19 septembre après-midi. La ligne interne du PS semble claire : couvrir l’intervention violente, brutale et hors cadre de l’école que ce soit dans les mesures de contention, l’appel à la police, l’absence d’information donnée à la famille, le briefing entre la direction et la police à la suite duquel un des policiers est littéralement tombé sur Mathis, l’absence de débriefing avec Mathis et sa maman et d’enregistrement des mesures de contention, etc.) déplacer le dossier vers la ministre de l'Intérieur, Annelies Verlinden (CD&V), c’est-à-dire vers le gouvernement fédéral de façon à éteindre la responsabilité de WBE. C’est à cette condition active que la ministre peut déclarer avoir été « choquée » par les images de l’intervention policière sans que ceci ne semble engager la moindre responsabilité de la ministre ou de WBE (Julien Nicaise).
L’affaire Mathis n’est pas seulement une question d’orientation ou de brutalité policière hors sol. L’affaire Mathis est l’affaire d’un excès de violence institutionnelle et disciplinaire (qui sort du cadre prévu par la circulaire) d’une école de la WBE qui refuse de prendre ses responsabilités et charge Mathis et sa maman pour protéger la responsabilité du réseau de la FWB.
Ce que montre la vidéo ainsi que la chronologie circonstanciée des faits, c’est une brutalité policière qui est marquée par une volonté d’humiliation. Au moment du placage ventral, Mathis était tranquille, sous la surveillance d’une policière. La version d’une « crise aiguë » de 2h ne correspond pas aux faits chronologiques et n’a qu’une seule fonction : couvrir l’intervention disproportionnée de l’école et de la police aux fins de poursuivre Mathis pour « indiscipline » et « mise en danger sur mineur ».
Tentative de déresponsabilisation : une stratégie du PS dans l'affaire Mathis ?
Cette volonté d’humiliation est clairement négrophobe mais il s’agit d’une volonté armée par l’école qui commandite le placage ventral. On entend très distinctement dans l’enregistrement vidéo que les policiers font usage d’éléments disciplinaires transmis par l’école. Le briefing entre l’école et la police à l’issue duquel le policier tombe littéralement sur Mathis a contribué à la déshumanisation de Mathis, préalable à tout excès de violence négrophobe. « T’es un gangster », « je te mets dans cette position [placage ventral] et si ta maman fait la maligne, je la plaque au sol », « Mathis tu insultes maman à la maison », « madame je ne m’adresse pas à vous », etc. Aucune de ces phrases n’est innocente pas plus qu’aucun des termes retranscrits dans le pv de police contre Mathis.
En commission Éducation, Caroline Désir reconnaît n’avoir pas suffisamment d’éléments, un rapport circonstancié à WBE aurait été demandé sans qu’on ait le moindre élément ni aucune échéance. Pourtant la ministre de l’Enseignement prétend que la « crise aiguë » aurait durée 2h, ce qui ne correspond pas à la chronologie circonstanciée et que la police aurait été appelée pour « protéger Mathis ». La vidéo montre ce qu’il en a été en termes de « protection ». La Ministre s’avance ainsi beaucoup sans pouvoir pour autant soutenir cette version par des éléments probants et étayés.
Mathis et sa maman font l’objet de poursuites et de pressions depuis l’intervention de la police du 5 septembre. Pour éviter, comme semble le vouloir la ministre, que ce type de violences policières racistes instrumentées par des écoles en sous effectif ou en incapacité professionnelle de répondre aux problèmes de racisme vécu dans le cadre scolaire ne se reproduisent, c’est aujourd’hui à Caroline Désir de joindre les actes à la parole. Il faut une évaluation indépendante effectuée sur base du respect du principe contradictoire, donc pas uniquement sur la version excessive et contradictoire de l’école mais également sur base du témoignage de Mathis et de sa maman ainsi que sur les éléments instructibles de la vidéo. Il en va de l’image de la WBE aussi à l’international car l’affaire Mathis a eu un impact bien au-delà des frontières de notre pays malgré le silence médiatique de la presse mainstream en Belgique.