Le constat est là. Il y a de plus en plus de sans-abri (ou de sans chez soi) à Bruxelles. Le pourcentage est de 27,72% de plus qu'il y a trois ans, en 2018. Bien sûr, Bruxelles n'est pas la seule touchée. D'ailleurs, le sans-abrisme touche aussi en dehors des grandes villes ou mégapoles. Le nombre d'enfants et de jeunes adultes (18-25 ans) sans abri est assez important, comme nous le rappellent des experts.

Pour ce qui est de la région bruxelloise, on compte 4.380 adultes et 933 enfants (contre un peu plus de 600 en 2018) qui sont sans-logement. Dans la ville de Gand (Belgique), 1.472 adultes et 401 enfants sont concernés, contre 422 adultes. Du côté de Liège, 932 adultes et 78 enfants. Au Limbourg, on dénombre 285 enfants et 149 adultes. Pour Arlon, on a 69 enfants. Arlon est l'unique ville belge qui organise un accueil de nuit en hiver dans la province de Luxembourg.

Le sans-abrisme se transmet

En fait, les enfants partagent la mauvaise situation de logement de leurs parents. Caroline George, coordinatrice de projets à la fondation Roi Baudouin, explique : "La proportion des enfants varie de 15 à 30% selon les villes, mais heureusement on voit très peu d'enfants qui dorment dans la rue"

Elle ajoute : "Ils sont le plus largement représentés dans les foyers d'hébergement, ce qui montre que des solutions leur sont données. Beaucoup sont dans des situations de sans-abrisme caché et dorment chez des proches".

"Les 18-25 ans dépassent les 20%, ce qui signifie que le stéréotype du vieillard au coin de la rue ne correspond plus à la réalité. Nos premières données rejoignent des évolutions observées dans la littérature internationale, à savoir que le sans-abrisme est en train de rajeunir, qu'il y a une féminisation du public, qu'il y a plus de familles... Il y a aussi plus de personnes avec un passé migratoire, mais avec de grandes variations selon les villes. A Gand, on a jusqu'à 57% de personnes dans l'illégalité. Dans la littérature internationale, il y a des jeunes avec un passé migratoire, mais aussi d'autres qui ressortent d'institutions d'aide à la jeunesse ou qui sont en situation de conflit familial".

Environ un tiers de femmes

Quant à elles, les femmes représentent à peu près 30% des sans-abri. Caroline George. explique, en outre : "La majorité des personnes recensées ont des aides ou même des revenus du travail". Une partie importante des personnes recensées se trouve par ailleurs dans une situation de sans-abrisme et d'absence de chez-soi depuis plus d'un an.

Le sans-abrisme et les problèmes de santé mentale, de toxicomanie et drogue, de passage en prison sont toujours liés aujourd'hui. 

Ces chiffres émanent d'une étude. Elle a été réalisée par des chercheurs de LUCAS KULeuven et de l'ULiège et 120 organisations les 29 et 30 octobre dans les villes d'Arlon, de Liège, de Gand et dans la province de Limbourg. C'était à la demande de la Fondation Roi Baudouin.

La ville de Louvain a de plus réalisé un dénombrement similaire, un peu plus tôt. C'était en février 2020. Pour Bruxelles, l'organisation Bruss'help a organisé son dénombrement bi-annuel le 9 novembre dernier, en collaboration avec 76 organisations de la santé et du social, 15 CPAS et pas moins de 230 bénévoles.

La crise covid empire les choses

C'est à Bruxelles que l'évolution du sans-abrisme est la plus perceptible. Cela permet notamment de constater une tendance à l'éparpillement depuis 2014, depuis le centre-ville et les alentours des trois principales gares vers différentes communes bruxelloises. "L'aspect de non accès à un logement abordable et de qualité en région bruxelloise est saillant à Bruxelles", relève François Bertrand, directeur de Bruss'help. "Il préexistait à la crise, qui vient amplifier ses effets... C'est surtout l'onde de choc pour les mois et années à venir qu'on a du mal à appréhender".  

"En Belgique, on manque actuellement de chiffres clairs et comparables", selon la Fondation Roi Baudouin. "De telles données sont indispensables pour élaborer une stratégie efficace de lutte contre la problématique". Elle réitèrera ce dénombrement en octobre 2021 avec les chercheurs et nouera de nouvelles collaborations avec 4 autres villes.

Il faut noter que les sans-abris sont une catégories qui subit fréquemment la violence. Elle peut venir de gens mais aussi de policiers, comme cela a été le cas, à Mons. La violence peut aussi être plus subtile, comme les amendes que données au sans-abris pour "non respect du confinement" ou pour "avoir bu de l'alcool au centre de Bruxelles" (ce qui a été interdit par le bourgmestre socialiste Philippe Close.