En ce jour de fête nationale, les sans-papiers grévistes ont annoncé l'arrêt de leur grève de la soif et la suspension de celle de la faim car un accord politique serait en vue...
Ce mercredi, vers 15h30, plusieurs représentants des sans-papiers se sont rassemblés devant l’église du Béguinage, au centre de Bruxelles, pour annoncer une bonne nouvelle.
“Hier et aujourd’hui, il y a eu des réunions avec le gouvernement et avec des soutiens. On est arrivé à mettre en place des accords, qui ne sont pas encore validés. Nous espérons (qu’ils le seront). Pour qu’il n’y ait plus de stress et d’angoisse à l’intérieur de l’église, on a pris la décision d’arrêter la grève de la soif et de suspendre, pour le moment, la grève de la faim”, a déclaré l'un des représentants.
Sur Twitter, le secrétaire d’État à l’Asile et la Migration, Sammy Mahdi s’est dit “soulagé”, avant d'ajouter sans aucune gêne : “Espérons que personne ne restera avec des séquelles permanentes.”
Arrêt, suspension, mais pas fin du mouvement
Si le drame semble, pour l'heure, écarté ; si le soulagement n'a cessé de s'exprimer sur les réseaux sociaux comme dans les médias traditionnels, le dossier est loin d'être bouclé. Confirmée, la grève de la faim est bien suspendue à l'église du Béguinage et à l'ULB. Cependant, à l'heure d'écrire ces lignes, l'action se poursuivrait à la VUB. Ce qui signifie qu'à ce stade, entre 50 et 75 personnes n'ont pas confirmé suspendre leur action de grève de la faim.
Quant aux nouvelles propositions du cabinet de Sammy Mahdi aux ex-grévistes, difficile d'en connaître, à ce stade, la teneur exacte. Mais voici ce qu'en pense l'USPR (Unions des sans-Papiers pour la Régularisation) dans un communiqué, diffusé ce mercredi vers 17h : "En substance, il s'agit de donner la possibilité aux occupants de faire valoir des éléments d'ancrage, de vulnérabilité, de séjour, etc. permettant l'octroi d'un permis A via la procédure 9 bis. Pour les dossiers les plus fragiles, la possibilité d'une protection humanitaire sur la base d'un 9 ter est également sur la table. "
Et le syndicat de sans-papiers de conclure : "L'USPR acte la main tendue du Secrétaire d'Etat. Sur cette base, une suspension provisoire des grèves de la faim et de la soif est en cours de discussion [...] Toutefois ce pas en avant n'est pas suffisant pour garantir l'accès au travail légal. La suspension de la grève n'acte pas la fin du mouvement. L'USPR continuera la lutte autour du permis unique tant au niveau régional que fédéral, afin d'obtenir des garanties supplémentaires et sortir les travailleurs et travailleuses sans-papiers de la clandestinité. Il aura fallu de trop nombreux sacrifices pour faire bouger le Secrétaire d'Etat sous la menace d'une crise gouvernementale."
Rétroactes
Cela fait donc sept mois que 450 sans-papiers bruxellois occupent l’église du Béguinage, et des locaux de l’ULB et la VUB pour dénoncer leur situation d'exploitation multiformes et réclamer des permis de séjour et de travail. Devant la longue intransigeance du Secrétaire d'Etat Mahdi, ces femmes et ces hommes étaient partis en grève de la faim depuis sept semaines. Une grève de la faim aggravée par une grève de la soif qui avait démarré le 16 juillet dernier.
Après de nombreux appels, belges et internationaux, s'inquiétant de l'imminence d'un mort parmi les sans-papiers, la menace d'une démission collective au sein du du gouvernement De Croo a relancé les pourparlers. Apparemment, sur des bases plus constructives. Synonyme de chute de la coalition Vivaldi, la menace de démission a été lancée par le PS (4 ministres) et suivie par Ecolo (3 ministres) si "une seule personne sans-papiers venait à décéder".
Un coup de poker politicien qui semble avoir payé. Un geste courageux posé parallèlement à l'urgence que requiert les immenses dégâts des inondations wallonnes (31 morts et des milliers de sinistrés). Si les deux dossiers ne sont évidemment pas liés, les deux exigent des réponses politiques à la hauteur de la gravité de chaque situation.
Bien sûr, on y verra plus clair dans les prochains jours. Si on semble se diriger vers une sortie de crise, il s'agira aussi de construire une solution structurelle à la problématique des sans-papiers de Belgique. Pour que tout ne recommence pas dans deux, cinq ou dix ans...